(Photo : France Poirier)
Le maire Stéphane Maher a témoigné à son procès.
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Procès Stéphane Maher : Coupable ou non coupable

Par France Poirier

C’est la semaine dernière qu’avait lieu le procès du maire de Saint-Jérôme, Stéphane Maher, au Palais de justice de l’endroit. Quatre jours ont été nécessaires, un de moins que les cinq prévus au départ. Résumé des évènements de la semaine .

Lundi le 26 octobre ( Jour 1 )
L’admissibilité de l’enregistrement

On assistait au début du procès du maire, accusé sur deux chefs d’accusation en vertu de la Loi électorale en lien avec les élections municipales de 2017. La poursuite, le Directeur général des élections du Québec, accuse le maire de malversation électorale, alors qu’il aurait proposé des emplois aux candidats Mario Fauteux et André Marion, en échange du retrait de leur candidature à l’élection municipale de 2017. Mario Fauteux était le premier témoin. C’est lui qui a enregistré une conversation avec le maire, qui a mené à ces accusations. Par ailleurs, c’est justement cet enregistrement qui est au cœur de cette première journée.

La juge Maria Albanese devra décider si cet enregistrement pourra être admis, c’est l’étape du voir-dire. La procureure du DGEQ, Me Geneviève Lemay, accompagnée de Me Corinne Fournier, a interrogé le témoin sur les raisons qui l’ont mené à la politique municipale et celui-ci a relaté ses expériences comme organisateur d’élection au niveau provincial. Mario Fauteux a enregistré le maire Maher le 6 octobre 2017, journée de la fermeture des candidatures pour l’élection municipale de novembre 2017. Selon Me Brunet, on compte 72 inaudibles dans l’enregistrement. Pour lui, il ne s’agit pas d’un enregistrement fiable, ni valable. Quant à la partie adverse, la procureure au dossier soutient tout à fait le contraire et que le document est très clair.

Mardi 27 octobre ( Jour 2 )
Témoignages de Marion et Fauteux

D’entrée de jeu, la Juge Maria Albanese a rendu sa décision sur l’admissibilité de l’enregistrement. « La qualité doit être suffisante, la Cour a entendu et s’est déclarée satisfaite de la qualité. La grande majorité des mots sont audibles. La valeur probante l’emporte compte tenu de ce qui est au centre du litige (…) », a souligné la juge en admettant l’enregistrement comme preuve.

Me Geneviève Lemay a demandé au témoin de relater sa rencontre du 6 octobre 2017. Il explique que le maire était présent ainsi que les conseillers Gilles Robert et Benoit Beaulieu. « Au début c’était cordial, le maire m’a dit: On a des bonnes nouvelles et une moins bonne nouvelle.» Il m’a parlé des enquêtes du BIPA et de l’UPAC concernant l’administration du maire Gascon et que je pourrais être mêler à ça comme organisateur électoral. Il m’a alors dit qu’il ne me voulait plus dans son équipe.  Ça a été la pire journée politique que j’ai vécue », a relaté avec émotion Mario Fauteux. Selon le témoin, le maire aurait mentionné lors de la rencontre: « Je vais te sortir en héros, tu ne seras pas candidat et en compensation je t’offre un poste de prestige au Parc régional de la Rivière-du-Nord ou à l’Écocentre.

Il connaissait mes intérêts pour l’environnement et pour le parc. Quand il m’a parlé du BIPA et de l’UPAC, j’étais dans un état de panique, de peur, j’étais dévasté, démoli. Je suis demeuré complaisant et j’ai dit que la proposition était intéressante et que j’allais y penser ».

André Marion

Il est venu raconter sa rencontre avec le maire, le 6 octobre 2017, alors que ce dernier lui aurait proposé un emploi dans le domaine culturel, un champ d’intérêt pour monsieur Marion. « Il m’a dit: J’ai une bonne et une mauvaise nouvelle, tu ne fais plus partie de l’équipe. Par souci d’équilibre, Sophie St-Gelais va se présenter à ta place pour avoir la parité homme et femme. J’étais abattu, je perdais mes ressources financières, à l’époque mon petit garçon avait deux ans. Quand il m’a proposé un poste, ça m’assurait un emploi. J’avais les jambes sciées parce que je m’enlignais pour une élection par acclamation. Me Robert a voulu savoir pourquoi il ne s’était pas présenté comme indépendant. J’étais sous le choc, c’est difficile de se présenter sans une équipe ». Alors qu’on devait entendre les conseillers, Benoit Beaulieu et Gilles Robert ainsi que les conseillères Nathalie Lasalle et Johanne Dicaire, la poursuite a plutôt annoncé que sa preuve était complète.

Mercredi 28 octobre ( Jour 3 )
L’accusé à la barre

Me Geneviève Lemay, avocate du Directeur générale des élections du Québec (DGEQ).

« Je n’avais plus confiance en eux », a souligné le maire de Saint-Jérôme, Stéphane Maher, en interrogatoire principal. C’est pour cette raison qu’il dit avoir exclu les conseillers Marion et Fauteux de sa formation politique le 6 octobre 2017. En contre-interrogatoire, l’avocate du DGEQ, Me Geneviève Lemay, a voulu démontrer que M. Maher n’avait pas confiance en eux, mais qu’il leur avait tout de même offert des postes. « J’étais en mode empathique. Je n’avais plus confiance en eux pour faire partie de ma formation politique, mais je ne voulais pas les empêcher d’avoir un poste de prestige dans des domaines qui les intéressaient. »

Il a expliqué que des postes de prestige sont des postes non rémunérés, mais que l’enjeu monétaire était important pour les deux exclus. Le défendeur a souligné qu’il avait choisi la date du 6 octobre 2017 par stratégie politique. « Ce n’est pas personnel. Je me suis engagé à ne pas faire de campagne de salissage. Il ne faut pas franchir la ligne entre le personnel et le politique. » La poursuite a demandé à plusieurs reprises à Stéphane Maher pourquoi proposer des postes de prestige à des personnes en qui il n’avait pas confiance. À cela il a répondu qu’il n’avait pas confiance aux deux politiciens et que « l’enregistrement clandestin » de Mario Fauteux lui démontre qu’il a eu raison de ne pas lui faire confiance. Il a souligné n’avoir rien contre les deux hommes, mais qu’il ne pouvait pas leur faire confiance dans le cadre de son organisation politique.

Jeudi 29 octobre ( Jour 4 )

Jeudi, les deux parties présentaient leurs plaidoiries. Me Robert Brunet, l’avocat de la défense, a référé aux constats d’infraction. L’acte d’accusation selon lui réfère au fait que Marion et Fauteux ne se soient pas présentés comme candidats indépendants. « Pourquoi monsieur Maher a décidé de se débarrasser des candidats et de le faire à la dernière minute? » Pour lui il s’agissait d’une stratégie électorale.

« Quant à monsieur Marion, il a rendu un témoignage clair et précis que dès le début ( de la conversation), il n’était plus candidat dans le parti du maire (…). Pour les deux ex-conseillers, il était clair que ça ne valait pas la peine de se présenter indépendant. » Puis, la défense, par l’entremise de Me Jean-François Langlois, est venue présenter des décisions en matière d’enregistrements clandestins, quant à la fiabilité et la force probante. « Ce que la juge aura à déterminer est ce qu’elle fera de l’enregistrement. Il a été admis dans le cadre du voir-dire, mais peut-il être admis pour la décision ? », a plaidé Me Langlois. Me Corinne Fournier plaidait pour la poursuite et elle a présenté des décisions relatives aux lois électorales. D’entrée de jeu, elle a souligné que « le caractère clandestin de l’enregistrement n’affectait pas sa valeur probante ».

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