Grignon, Rochon, Rolland et Morin : Des familles qui ont fait les Laurentides
Par Simon Cordeau
La Ville de Sainte-Adèle a identifié Wilfrid Grignon, Pauline Rochon et Olivier Rolland comme personnages historiques. Elle a aussi cité la maison d’Augustin-Norbert Morin comme immeuble patrimonial. Voici leur histoire, qui est intimement liée à celle des Laurentides.
Wilfrid Grignon
Wilfrid Grignon nait en 1854 de Médard Grignon, marchand et aubergiste de Saint-Jérôme, et d’Henriette Lalande. Habitant près de l’église de Saint-Jérôme, le jeune Wilfrid est impressionné par le curé Labelle, qui arrive en 1868, ses discours et sa passion pour la colonisation du Nord.
Après ses études en médecine, le Dr Grignon pratique d’abord à Sainte-Thérèse puis à Bouctouche, au Nouveau-Brunswick, où il rencontre son épouse, Eugénie Baker. Autour de 1878-79, il s’installe à Sainte-Adèle. Son arrivée structure la nouvelle ville, créée en 1855.
Comme maire de Sainte-Adèle (1886-1892; 1899-1904) et préfet du comté de Terrebonne, il fera la promotion de Sainte-Adèle dans les journaux canadiens et même américains. Il jouera un rôle actif dans l’arrivée du train en 1891, la construction d’une école en 1901-1902, et l’arrivée de la papeterie Rolland en 1902. Il fera aussi construire un aqueduc, à ses frais, pour fournir une quinzaine de résidents en haut du village.
Il sera nommé agronome et conférencier par la Province de Québec, ce qui témoigne de son dévouement pour les colons. Il mettra sur pied une ferme expérimentale, où il mènera des recherches sur les races chevalines et les vaches laitières. Il ouvrira également une clinique vétérinaire à Mont-Laurier avec son fils Louis.
C’est aussi dans sa résidence que se trouve le bureau de poste et, en 1904, le central téléphonique : le premier au nord de Saint-Jérôme.
Le Dr Grignon aura neuf enfants, dont le plus jeune, Claude-Henri Grignon, rendra Sainte-Adèle célèbre avec son roman Un homme et son péché et ses Belles histoires des pays d’en haut à la radio et à la télé.
Wilfrid Grignon meurt en 1915.
Pauline Rochon
Pauline Rochon nait à Ottawa en 1906. La Franco-Ontarienne arrive au Québec au début des années 1940. Elle étudie la peinture auprès des artistes Louis Muhlstock et Agnès Lefort, et fait partie de l’Art Association of Montreal. Vers 1945, elle s’installe à Sainte-Adèle où elle se consacre aux portraits peints. Son commerce, La Pèlerine, est situé sur la côte Morin.
En 1949, elle fonde le Centre d’art de Sainte-Adèle. C’est la première femme à fonder un centre d’art au Québec. Rochon souhaite créer un endroit pour les artistes hors de la formation académique, mais aussi adapter les matériaux et les techniques pour créer un art d’ici. On présente aussi au Centre d’art des films, du théâtre, des concerts et on y tient des causeries. L’été, des cours sont offerts aux touristes.
Avec l’artiste Robert Lapalme, Rochon crée la Nuit laurentienne avec la réalisation, entre autres, d’une immense fresque sur la côte Morin. Cette oeuvre collective nécessitera plus de 500 livres de peinture, et s’étendra du boulevard jusqu’à la côte 40.
En 1950, des lanternes chinoises sont déployées dans tout le village, des feux d’artifice sont présentés sur les Pentes 40-80, et une parade de chaloupes illuminées est présentée sur le lac Rond.
En 1952, le céramiste Claude Vermette et la lissière Mariette Rousseau viennent s’établir à Sainte-Adèle et deviennent des alliés indéfectibles du Centre d’art. Ensemble, ils se rendent aux États-Unis pour en faire la promotion. Cela amène des retombées à Sainte-Adèle et en fait une ville incontournable dans le milieu culturel.
Puis Pauline Rochon se retire à Clear Water en Floride, où elle décède en 1962.
Olivier Rolland
Olivier Rolland nait à Saint-Jérôme en 1884. Il est le fils de Stanislas-Jean-Baptiste Rolland, le président de la Compagnie de papier Rolland. Durant son éducation, il ira entre autres au Manchester Institute of Technology en Angleterre.
Après son diplôme, il poursuivra sa formation dans les grandes fabriques de papier de France et d’Allemagne. Il participera d’ailleurs à l’Exposition internationale de l’industrie du livre et des arts graphiques de Leipzig, en 1914. Il doit cependant regagner le Canada, lorsque la Première Guerre mondiale éclate.
Chimiste de formation, il débute à l’usine Rolland de Saint-Jérôme en 1916, puis est nommé gérant de l’usine de Mont-Rolland, à Sainte-Adèle, l’année suivante. Il deviendra directeur général de l’entreprise, puis son vice-président en 1946, lorsque son père prend sa retraite.
Olivier Rolland participera activement au développement de Mont-Rolland. Il s’impliquera dans la construction de l’église, de l’école Saint-Georges et de l’école commerciale et agricole Saint-Jean-Baptiste. Membre fondateur de la caisse populaire, il en assumera la présidence de 1919 à 1942. Il dotera aussi la municipalité de plusieurs infrastructures sportives.
Olivier Rolland meurt en 1975.
Maison d’Augustin-Norbert Morin
Né en 1803 à Québec, Augustin-Norbert Morin était un avocat, un journaliste et un homme politique majeur dans l’histoire du Québec. Il est le fondateur du journal La Minerve. Comme député du Parti patriote, il rédige les 92 résolutions, qui visent à rendre le Bas-Canada plus démocratique, et les défend à Londres en 1834. Lorsqu’elles sont rejetées, il participe à la rébellion des Patriotes de 1837 et 1838.
Il sera ensuite co-premier-ministre du Canada-Uni de 1851 à 1855. Il abolit le régime seigneurial en 1854. Il participe aussi à la création du Code civil, adopté en 1865.
Morin a joué un rôle primordial dans la colonisation du Nord. Entre autres, il fonde Sainte-Adèle en 1855, qu’il nomme en l’honneur de sa femme, Adèle Raymond. Il meurt à Sainte-Adèle en 1865.
La maison Augustin-Norbert-Morin est construite en 1844. La demeure a accueilli plusieurs propriétaires qui ont également contribué à l’essor de Sainte-Adèle, dont le Dr Lachaîne, les meuniers Marier et la famille d’Onésime Lamoureux.
Située au 2605 rue de la Rivière, près de la rivière du Nord et de la Rolland, c’est l’un des plus anciens bâtiments de Sainte-Adèle.
Au niveau architectural, le bâtiment a plusieurs caractéristiques de la maison traditionnelle québécoise d’inspiration néoclassique, apparue autour de 1840. Notons par exemple sa structure de pièces sur pièces assemblées à tenons en coulisse : un mode de construction répandu dans la vallée du Saint-Laurent au 18e et au début du 19e siècle.
Citer l’immeuble comme patrimonial fait en sorte que tout propriétaire du bâtiment devra prendre les mesures nécessaires pour assurer la préservation de la valeur patrimoniale de ce bien.