Une ex-fugueuse raconte son histoire

Par Lpbw

TÉMOIGNAGE. Violée par son pimp alors qu’elle avait à peine 15 ans, Julie (nom fictif *) a décidé de lever le voile sur ce douloureux événement pour sensibiliser les jeunes femmes aux dangers reliés à la fugue.

Son histoire d’horreur a commencé à l’école secondaire où elle a été recrutée par un homme qui voyait en elle une proie potentielle. Isolée, n’ayant pas beaucoup d’amis et peu d’estime d’elle-même, Julie s’est laissée convaincre de suivre cet inconnu jusqu’à Montréal, même si elle se savait complètement perdue dans cette ville.

Le soir même, l’adolescente et l’homme prennent le métro pour se rendre dans un bar miteux. Dans ce sous-sol d’un immeuble, elle consomme de la bière en compagnie de quelques hommes. «À l’époque, j’étais assez bien fait. Je me faisais pas mal regarder. J’avais l’impression d’être une tranche de steak», se rappelle Julie qui a aujourd’hui dans la quarantaine.

À un certain moment, un homme de race noire s’approche d’elle et lui tend une bière. Lorsqu’elle prend la première gorgée, l’adolescente ne se sent pas bien. «Je me souvenais de ce que je faisais sur le coup, mais trente secondes après, je ne me souvenais pas de ce que j’étais en train de faire. C’était vraiment bizarre», raconte-t-elle.

Encore aujourd’hui, Julie ne sait pas ce qu’il y avait dans le verre, mais elle se doute que c’était du GHB, aussi appelé «drogue du viol».

Un événement traumatisant

Peu de temps après, Julie quitte le bar en taxi avec «trois ou quatre» gars. L’homme qui est venu la chercher à la polyvalente demande au chauffeur de taxi de se rendre à son appartement. Arrivée sur place, Julie, qui était seule avec le proxénète, s’est fait agresser sexuellement. «Il a commencé à me faire des menaces…c’est quelqu’un qui tripait sur les armes à feu. Ensuite, il m’a violé. J’ai encore de la misère avec ça aujourd’hui», confie-t-elle.

Le lendemain matin des gars sont venus rendre visite au pimp. Elle se doute que quelque chose ne tourne pas rond. Des années plus tard, elle comprendra que les hommes manigançaient sans doute pour l’acheter. «J’ai réalisé qu’il voulait s’entendre sur le prix», explique-t-elle. Il y a quelque temps, Julie s’est mise à pleurer lorsqu’elle a vu un de ces hommes dans un documentaire sur le commerce du sexe. Elle était heureuse d’apprendre que ce proxénète était maintenant derrière les barreaux.

Après cette visite, Julie a réussi à appeler des membres de sa famille qui sont venus la chercher rapidement. Sa fugue aura duré moins de 48 heures, mais elle s’en souviendra toute sa vie.

Pas confiance aux hommes

Cet événement, qui est survenu il y a 27 ans, a laissé des traces chez Julie. «Il y a des blessures et des séquelles qui suivent. Ça détruit ma vie pendant des années. Je n’étais pas capable d’avoir une vie de couple. Je n’avais pas confiance aux hommes et pas une grande confiance en moi. Je doutais beaucoup de mes capacités. Ç’a créé de l’isolement chez moi», raconte celle qui confie que la honte l’a longtemps habité.

Pendant plusieurs années, ses relations avec les hommes ont été compliquées. «Dans ma tête, c’était sûr que je ne pourrais jamais aimer un homme dans ma vie».

Heureusement, la mère d’une adolescente de 13 ans a trouvé l’amour. «Je m’en suis sortie et j’ai maintenant une belle vie. Je n’ai pas de séquelles sexuelles avec mon mari», affirme la femme qui, même après toutes ces années, n’a jamais parlé de cette histoire à sa mère.

Son histoire ne se termine pas de façon tragique. Toutefois, Julie sait que ce n’est pas toutes les fugueuses qui ont cette chance…

*Son nom a été changé pour des fins du reportage et pour préserver son anonymat.

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