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Poursuivre sa vie après le suicide de son conjoint

Par France Poirier

Témoignage. Son conjoint lui avait dit: «Je vais coucher la petite, va te coucher». C’est la dernière fois qu’elle l’a vu vivant. C’était le 31 mars 2011, alors que la vie de Karine Rousseau a basculé. Son homme venait de s’enlever la vie et laissait derrière lui son amoureuse avec ses deux enfants, un garçon de 2 ½ et une petite fille d’un mois à peine, ainsi qu’un autre garçon de 7 ans, né d’une autre union.

Si ce n’était du Centre de prévention du suicide le Faubourg, qui offre soutien aux familles qui vivent ce terrible deuil, Karine Rousseau affirme qu’elle ne serait plus là. Après s’être couchée ce soir-là, elle s’est réveillée dans un sursaut et s’est mise à chercher son homme dans la maison, puis à l’extérieur.

«Après avoir retrouvé une lettre et paniquée, j’ai appelé mes parents et le 911. Il y avait des pas vers le boisé derrière chez nous, puis, j’ai pensé que mes enfants étaient seuls dans la maison, je suis retournée à l’intérieur en attendant les secours. Avec mon père et les policiers, nous avons fait des recherches et nous l’avons retrouvé», se souvient douloureusement Karine. «Une image que je n’oublierai jamais et avec laquelle je m’endors encore».

Culpabilité

Le décès par suicide a d’énormes répercussions sur les proches. «Je me suis longtemps demandée pourquoi ça m’arrivait à moi? Quels signes je n’avais pas vus? Qu’est-ce que j’avais fait? On retourne des jours, des semaines, des mois précédents l’événement pour trouver ce qui a bien pu se passer dans sa tête», raconte Karine.

Il lui avait laissé une lettre, mais il a écrit ce qu’il voulait bien dire et elle n’a pas trouvé de réponse dans celle-ci: «Je m’en remets à Dieu, prends soin de toi et des enfants». «On avait tout pour être heureux, chacun un bon emploi, de beaux enfants, on s’aimait. J’ai réalisé que le suicide peut toucher n’importe qui et de toutes les couches de la société. La personne qui choisit cette solution permanente à un problème temporaire a une perception déformée, elle pense qu’elle ne s’en sortira jamais, mais il y a toujours des solutions. Il faut aller chercher de l’aide», lance-t-elle.

Dire la vérité

Lorsque ses enfants ont commencé à poser des questions, elle trouvait important de leur dire la vérité et elle a consulté le Centre de prévention du suicide le Faubourg pour savoir comment répondre aux enfants. «Je ne voulais pas sombrer dans la dépression et je voulais leur donner l’image d’une maman forte, une maman qui se tenait. Ils ont une résilience incroyable», ajoute Karine.

Si elle accepte d’en parler publiquement, c’est parce qu’elle souhaite aider d’autres personnes qui vivent la même chose qu’elle ou pour d’autres qui iront chercher de l’aide avant de commettre l’irréparable.

«Nous offrons des outils pour les personnes endeuillées, que ce soit des rencontres individuelles, de groupes avec différents ateliers. C’est important d’en parler pour que les gens sachent qu’il y a des ressources et de l’aide», souligne Caroline Chrétien, coordonnatrice clinique au Faubourg. Il y a aussi une ligne d’intervention téléphonique pour les personnes en détresse ou en crise, soit le 1-866-APPELLE.

 

Pour parler à un intervenant dans les Laurentides, composez le 450 569-0101 ou sans frais le 1 866-APPELLE (277-3553).

Statistiques au Québec (2013)

1101 suicides (selon les données provisoires disponibles)

Le nombre de suicides stagne autour de 1100 par an depuis 2007, soit une moyenne de 3 suicides par jour.

Pour l’année 2013, le suicide a fauché près de trois fois (2,8) plus de vies que l’ensemble des décès routiers au Québec.

Le risque de suicide est 3,5 fois plus élevé chez les hommes que chez les femmes.

Les hommes représentent plus de trois quarts des suicides (855 hommes et 246 femmes en 2013).

Le taux de suicide augmente avec l’âge, atteint son maximum vers la cinquantaine et diminue par la suite.

En 2013, les hommes de 35-49 ans et de 50-64 ans ont connu le plus haut taux de suicide (taux respectifs de 32,5 par 100 000 et de 30,2 par 100 000).

Parmi les femmes, celles de 35-49 ans et celles de 50 à 64 ans sont les plus touchées (taux respectifs de 11 par 100 000 et de 9 par 100 000).

Les adolescents de 15 à 19 ans et les aînés de 65 ans et plus représentent les groupes les moins touchés.

 

 

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