Hélène Thibault, 25 ans plus tard
Par Lpbw
SAINT-JÉRÔME. Hélène Thibault, de Saint-Colomban, a pris part à la cérémonie du 6 décembre, Place de la Paix, à Saint-Jérôme. Ingénieure chez Hydro-Québec, elle était présente lors du massacre des quatorze jeunes femmes à l’École Polytechnique, en 1989. Elle a aujourd’hui 52 ans.
Actuellement en préretraite, Hélène Thibault nous confie qu’elle a eu peur, longtemps. « J’ai longtemps fait des cauchemars. Quand j’allais au restaurant, je regardais où étaient les sorties de secours. Je m’asseyais toujours de façon à voir la porte d’entrée. Les bruits forts, soudains, comme des feux d’artifice, me traumatisaient. J’ai travaillé sur moi. Maintenant, je suis capable de les entendre. »
Elle se rappelle que, 14 ans après la tuerie, des ballons ont éclaté à côté d’elle. « J’ai eu une heure de crises de nerfs. Il a fallu trois heures avant que j’aille bien. »
Hélène a été témoin des évènements. À ce moment-là, elle était dans le corridor « J’étais au 3e étage. Lui y était aussi. Il venait juste de passer dans le corridor. Je suis allé à ma case pour chercher mon manteau. Je croyais alors qu’il était au 4e étage. Quand je suis arrivée à ma case, j’ai entendu les cris, les coups de feu. Je n’ai pas vu les blessés ni les morts, mais j’ai entendu les coups de feu, les cris. C’est quelque chose qui marque beaucoup. »
« Il ne m’aura pas »
Hélène Thibault connaissait une des victimes, Annie Turcotte, ainsi qu’une autre jeune femme de cette classe, une amie, Geneviève. « Elle a été blessée à la tête et a fait la morte. C’est ce qui l’a sauvé. » Son amie Geneviève n’a pas été capable de reprendre les cours en janvier. « Elle a fini deux ans après moi alors qu’elle aurait dû terminer avant moi, elle était brillante. » Hélène a délibérément décidé de finir son cours. « Je me suis dit : il ne me m’aura pas, je vais continuer, pour garder vivant le souvenir des filles, il faut que j’ai mon diplôme. Ça aurait été facile de tout abandonner à ce moment-là, mais je voulais rester. C’était ma façon de combattre. »
En ce moment, et juste après les événements, Hélène Thibault a été très proactive dans le dossier du registre des armes à feu. « En janvier 90, après les évènements, j’ai toute de suite fait signer des pétitions pour le contrôle des armes à feu. »
Elle s’est également impliquée dans le dossier du registre, il y a deux ans, « quand on a été au parlement d’Ottawa pour essayer de sauver le registre. J’étais dans les manifestations. Je trouvais que ça n’avait pas de sens qu’on l’abolisse. Les policiers pouvaient vérifier si quelqu’un avait des armes, c’était un outil contre la violence conjugale », explique-t-elle. Je trouve que son retrait est impensable. C’est un non-sens. C’est qu’on avait réussi à tirer de cette fusillade-là. C’est frustrant, c’est choquant ! »
Samedi, à Saint-Jérôme, Hélène Thibault a été particulièrement touchée de voir, qu’après 25 ans, on les oublie pas « On ne doit jamais oublier. En ce moment, on est dans un mouvement d’actions pour le registre, pour lutter contre la violence faite aux femmes, des actions positives. » Elle est d’avis que c’est ce qui va faire que le mouvement ne va jamais s’éteindre.