(Photo : Marie-Catherine Goudreau)

Des recherches sur les forêts anciennes au coeur du Mont Kaaikop

Par Marie-Catherine Goudreau

Depuis des années, la Coalition pour la préservation du mont Kaaikop se bat pour que la montagne soit protégée des coupes forestières. Aujourd’hui, des chercheurs l’Institut des sciences de la forêt tempérée (ISFORT) de l’Université du Québec en Outaouais (UQO) sont sur le terrain pour y étudier les vieilles forêts qui s’y trouvent. Celles-ci, rares au Québec, pourraient être importantes pour la lutte contre les changements climatiques.

Sylvain Delagrange, chercheur à l’ISFORT, est à la base de ce projet de recherche. Il s’y est penché lorsqu’un ministre du gouvernement du Québec avait énoncé que les vieilles forêts ne fournissaient plus pour les coupures de bois et qu’il fallait les rajeunir. « De ce que je connaissais de la littérature, c’était l’inverse. Les vieilles forêts sont des réserves de biodiversité, des puits de carbone et des forêts très intéressantes », affirme-t-il.

Des recherches sur les forêts anciennes au coeur du Mont Kaaikop.
Photo : Marie-Catherine Goudreau.

Fixer le carbone

« Notre hypothèse est que l’aménagement forestier, en enlevant les gros arbres et en perturbant les sols, affecte le mécanisme de fixation de CO2 dans le sol. » Celui-ci est efficace pour lutter contre les changements climatiques et réduire la présence de carbone dans l’air.

La manière la plus efficace pour capter le carbone à long terme n’est pas dans les arbres et les troncs, mais plutôt dans le sol, explique le chercheur. « Il a été démontré que le carbone fixé dans le sol des forêts plus âgées le reste très longtemps. » Peu d’études avaient été faites à ce sujet toutefois au Québec.

« On a trouvé au mont Kaaikop des peuplements qui ressemblaient à de vieilles forêts. Alors, on a choisi cet endroit pour nos recherches », explique M. Delagrange. Ce qui est aussi intéressant à cet endroit, c’est qu’il y a des forêts aménagées à proximité. Cela permet donc de comparer les peuplements.

« On va regarder la séquestration de carbone des forêts aménagées par rapport aux vieilles forêts. »

Analyse des champignons

Les chercheurs vont plus particulièrement se pencher sur les communautés de champignons dans le sol. « Ces champignons s’associent avec des arbres, alors si on coupe les arbres, on pense que ça peut changer la quantité et la diversité. Cela peut affecter la fixation dans le sol », explique
M. Delagrange. « Ce n’est pas dramatique, mais c’est un moins bon service de fixation que si on laissait les forêts intactes. »

Avec des sortes de cuillères, les chercheurs vont prendre des échantillons du sol à différents endroits pour prélever les communautés de champignons. Ensuite, ils les donneront à l’organisme Génome Québec qui pourra analyser l’ADN de ces champignons. « Avec cette méthode, on trouvera entre 200 et 300 espèces champignons dans nos huit petites cuillères de sol », explique M. Delagrange. Il croit trouver au mont Kaaikop plusieurs centaines d’espèces de champignons différentes.

Différents groupes de champignons composent le sol, comme les décomposeurs, les parasites et les mycorhiziens, qui font des associations avec les arbres. Ceux-ci sont les plus intéressantes pour fixer du carbone. « Cette composition peut changer selon la façon dont le peuplement est aménagé », dit le chercheur. Par exemple, si on coupe la forêt, il y aura moins de bois morts à décomposer, et donc moins de nourriture. Les champignons peuvent alors moins incorporer le carbone dans le sol.

Des recherches sur les forêts anciennes au coeur du Mont Kaaikop.
Photo : Marie-Catherine Gourdreau.

Hypothèses et résultats

« On pense que le changement de structure de la forêt va faire en sorte qu’on va se retrouver avec des communautés de champignons différentes, qui sont moins intéressantes pour fixer le carbone dans le sol à long terme.»

Cet automne, l’équipe de recherche va recevoir les résultats de l’ADN des champignons et pourra donc passer à l’étape de l’analyse et de la discussion. « On devrait être prêt à présenter l’étude à la fin du printemps », explique M. Delagrange.

Au Québec, on a étudié peu les vieilles forêts tempérées, souligne M. Delagrange. C’est d’ailleurs pour cette raison que l’Institut des sciences de la forêt tempérée a été créé à l’UQO.

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