Les femmes en chiffres : entre reculs et réussites
Derrière les progrès scolaires et les avancées médicales, les chiffres racontent une autre histoire : celle d’inégalités persistantes, de violences encore trop fréquentes et d’un système qui peine à protéger les plus vulnérables.
Au Québec comme ailleurs au Canada, les statistiques sur la condition féminine dressent un portrait à deux visages. D’un côté, des gains indéniables : plus de femmes diplômées, mieux représentées et mieux soignées. De l’autre, des reculs inquiétants : féminicides, écarts salariaux, pauvreté et itinérance. Entre espoir et urgence, ces chiffres révèlent l’état réel de la situation des femmes aujourd’hui.
Ce qui fait peur
1) Le féminicide reste une réalité nationale. En 2024, le recensement indépendant du phénomène documente près de 187 femmes et filles tuées violemment au Canada; dans la majorité des cas où l’accusé est identifié, il s’agit d’un homme (≈93%). Ce bilan montre que la violence meurtrière à l’égard des femmes demeure structurale.
2) Les féminicides proviennent majoritairement d’un proche. Parmi les homicides résolus au Canada (données de 2021), près de 72 % des femmes et filles assassinées l’ont été par un partenaire intime ou un membre de la famille, ce qui confirme que le domicile reste un lieu à risque.
3) Des inégalités économiques persistantes : La disparité salariale reste significative : selon divers bilans récents, l’écart salarial moyen entre les sexes tourne encore autour de 10–16 % selon les méthodes et sous-groupes considérés, un frein majeur à l’autonomie économique des femmes.
4) Femmes et itinérance : une présence importante, parfois invisible. Les femmes représentent une part non négligeable des personnes en situation d’itinérance : certaines études estiment que jusqu’à 36 % des personnes en situation d’itinérance peuvent s’identifier comme femmes, et une part très élevée des familles en refuge est composée de mères seules. L’itinérance féminine est souvent « cachée » (couch-surfing, hébergement temporaire), donc sous-estimée.
5) Les services sont menacés par l’austérité : Les coupes ou le sous-financement (ministères, CNESST, organismes communautaires) risquent d’affaiblir la prévention, les refuges et les services d’accompagnement — exactement au moment où la demande augmente (signalé par réseaux régionaux comme le Réseau des femmes des Laurentides).
Ce qui est encourageant
1) Progrès en santé : le cancer du sein. Les avancées du dépistage, du traitement et du suivi donnent des résultats nets : la survie nette à 5 ans pour le cancer du sein chez les femmes est estimée à ~89 % au Canada, un signe fort des progrès médicaux.
2) Les femmes sont plus diplômées que jamais ! Les femmes ont rattrapé et souvent dépassé les hommes en matière de diplomation post-secondaire dans de nombreux champs : la proportion de diplômées collégiales et universitaires ne cesse d’augmenter, un atout pour l’autonomie.
3) Représentation politique en hausse (mais insuffisante) : Le nombre de femmes au Parlement a atteint des sommets récents – autour de 30 % des sièges à la Chambre des communes (selon la dernière législature) – signe d’un progrès mais aussi d’un plafond encore loin de la parité.
4) Meilleure visibilité des problématiques féminines, mobilisation régionale : La multiplication d’initiatives et de réseaux régionaux (ex. Réseau des femmes des Laurentides) et d’événements comme la Marche mondiale des femmes montrent une mobilisation renouvelée pour faire pression sur élus et décideurs. Ces mobilisations poussent à lier politiques de logement et enjeux de sécurité pour les femmes.
5) Réduction, pour certains groupes, de l’écart salarial : Les analyses intersectionnelles montrent aussi des reculs du fossé salarial pour certains groupes, comme les Canadiennes nées au pays, l’écart global se réduisant au fil des années grâce à des politiques d’emploi et à l’éducation accrue des femmes. Mais l’écart subsiste et varie fortement selon l’origine et le statut d’immigration.