Le grand coup de balai, le souffle dans le cou et le choix de l’apaisement
Par Philippe Leclerc
CHRONIQUE – Dimanche, c’était jour d’élections. Dans la Rivière-du-Nord, trois villes ont parlé : Saint-Jérôme, Prévost, Saint-Hippolyte. Deux autres sont restées muettes : Saint-Colomban et Sainte-Sophie, par acclamation.
En septembre, j’écrivais ceci : Saint-Jérôme doit retrouver son leadership de capitale régionale. Prévost n’est plus une ville-dortoir. Saint-Hippolyte doit apaiser ses divisions autour des bandes riveraines. Deux mois plus tard, le verdict colle à ce scénario. Balayage complet à Saint-Jérôme. Message frontal à Prévost. Choix d’un ton plus conciliant à Saint-Hippolyte. Pendant que Saint-Colomban et Sainte-Sophie ont sauté leur tour, la démocratie a pris tout son souffle là où l’on a voté.
Saint-Jérôme – le changement total
À Saint-Jérôme, Rémi Barbeau gagne, et son équipe balaie tout : treize sièges sur treize. C’est net. C’est fort. C’est un « assez, on change ». Campagne concrète et lisible : assouplir l’interdiction de stationner la nuit l’hiver. Apaiser les rues. Affronter logement et itinérance à hauteur humaine. Surtout, dire oui au développement sans arracher Bellefeuille. Le message a porté parce qu’il touche le quotidien.
L’euphorie a pourtant une ombre. Sans opposition, qui dira non quand il le faudra ? Le pouvoir a besoin de contrepoids. Même quand il se croit vertueux. À défaut d’adversaires en conseil, il faudra créer des garde-fous : comités ouverts, bilans publics, vraie place aux voix minoritaires. Le courage, ce n’est pas seulement décider. C’est accepter d’être contredit.
Barbeau entre aussi par une grande porte. À 34 ans, plus jeune maire de l’histoire de Saint-Jérôme, il doit replacer la ville comme capitale régionale. Cela passe par la préfecture de la MRC et un siège au CPÉRL. Là, on y parle transport, santé, habitation, université. De là, pousser fort pour la région. Ici, livrer vite sur ce qui a fait basculer la campagne : stationnement d’hiver plus intelligent, mobilité de quartier, et un développement qui protège au lieu d’entamer.
Un message pour Paul Germain
À Prévost, Paul Germain est réélu. De justesse. À peine environ 500 voix d’avance comme maire. Deux de ses six conseillers ont mordu la poussière. Signal limpide : on te suit encore, mais on te tient par la manche. La ville a grandi. Elle s’est complexifiée. Les chantiers s’accumulent, les attentes aussi.
On ne veut plus de grandes phrases. Du concret. Des routes réparées. Des trottoirs où l’on marche sans peur. Des équipements promis depuis longtemps. Un cœur de ville qui respire pour vrai. La 117 est devenue un boulevard Tashereau. Ce troisième mandat est un prêt à court terme, avec intérêts civiques. Il faudra réexpliquer. Corriger. Ajuster. Travailler avec des élus qui ne doivent rien à l’exécutif. Tenir le cap et ajuster la voile quand le vent tourne. Car le vent a un peu tourné à Prévost.
Baisser le ton à Saint-Hippolyte
Saint-Hippolyte, enfin, a choisi un autre ton. Isabelle Poulin l’emporte. Victoire d’une humeur autant que d’un programme. Les électeurs préfèrent l’écoute au bras de fer. Ici, on ne badine pas avec la paix d’un lac ni la quiétude d’un chemin. La politique se joue à hauteur de sentier. On surveille les ruissellements. On se rappelle que le chalet d’hier est devenu l’adresse d’aujourd’hui.
Poulin promet du lien et du soin. Des rencontres où l’on sort moins fâché. Des décisions expliquées sans jargon. On lui pardonnera des retards si l’on sent la bonne foi. Gouverner Saint-Hippolyte, c’est tenir ensemble le tranquille et le possible. Dire oui aux familles sans dire non aux arbres. Dimanche, les gens ont voté pour cet équilibre.
On me dira que les élections, ce sont des pancartes et des promesses. Je vois autre chose : le quotidien du peuple qui s’exprime et qui corrige. À Saint-Jérôme, le stationnement a parlé. Et la forêt aussi. À Prévost, la patience a donné sa dernière chance. À Saint-Hippolyte, les lacs ont demandé qu’on baisse d’un ton. Les attentes pour demain sont claires. Bravo à toutes et à tous.