La vieille cabane hantée
Par Mimi Legault
Je devais avoir autour de dix ans. Mes meilleurs amis étaient des garçons. Pas le choix. Des filles dans mon quartier, il n’y en avait pas de mon âge. J’avais bien des sœurs. Trois si je sais bien compter. Dont l’une n’avait pas deux ans de différence avec moi. Elle portait le célèbre prénom de Céline.
D’ailleurs, ma foi, elle le porte encore…. Mais je refusais de jouer avec elle parce qu’elle était toute en « nattes » que j’aimais tirer, tout en cris, souvent en pleurs et en poupées. Moi, ce que je préférais, c’était les sports. Et qui étaient adeptes du hockey, du baseball et du ballon-chasseur? Les garçons, bien sûr. Pour une question de survie, j’ai décidé de me tenir loin de ma petite sœur parce qu’elle n’arrêtait pas de se plaindre de moi. Que dis-je, elle hurlait le moindrement que je m’approchais d’elle. Je la touchais à peine, j’effleurais ses jolis rubans ou je tirais tout doucement sur ses crinolines qu’elle aimait tant porter. Bang, la sirène se déclenchait, un cri strident qui partait de sa petite gorge, on avait de la difficulté à la débrancher au grand dam de mes parents.
Ma mère se pointait au moindre gémissement de Céline tentant d’arrêter la petite tornade, grade 4. Je me suis alors tournée vers mes mecs Jean-Jean, Bob et Tom. Ce jour-là, nous étions justement en train de discuter de nos costumes d’Halloween. Mais Jean-Jean avait une idée précise en tête : aller faire un tour dans la vieille cabane que l’on disait hantée. C’était en fait une maison antique longtemps habitée, puis finalement abandonnée à cause de son délabrement. C’était strictement défendu d’y aller, mais bon, juste une fois n’était pas coutume et si en plus, on ne répandait pas la nouvelle, on aurait la paix côté parents.
31 octobre : tous les quatre nous sommes partis quérir des bonbons, mais en fait, on a bifurqué pour finalement se rendre à ladite maison. Nous étions fébriles et nerveux. Bob le vaillant avait apporté une lampe de poche. Pour faire son p’tit comique, Tom frappa à la porte qui s’ouvrit comme par magie. Ça commençait bien… Mais un hurlement à nous glacer le sang se fit entendre. On n’a pas eu le temps d’avoir peur qu’un voile blanc passa au-dessus de nous. Un fantôme! C’est moi qui pensais ça, mais je n’osais le dire à mes amis. Heureusement que je portais un masque, je me suis sentir pâlir dangereusement. C’est quoi ça, s’écrie Jean-Jean, en sursautant : une chose poilue venait de lui frôler les oreilles. La porte que nous venions de franchir derrière nous s’est ouverte toute seule et se referma dans un claquement sec. Un rire de sorcière éclata aux quatre coins de la pièce. Voilà que Bob, à force de trembler, échappa sa lampe qui s’éteignit sous le choc. Là, ce n’était plus drôle du tout. Du tout, du tout. On se tenait tous par la main, le clown pleurait, le squelette claquait des dents, le fantôme rêvait de disparaître et le pirate à un seul œil ferma l’autre pour ne plus rien voir. Là, s’écrie Tom, je viens de voir quelqu’un passer dehors. Et au même moment, une voix caverneuse nous dit : Ha ha mes petits, je vous donne une petite minute pour sortir de chez moi. En fait, cela nous prit dix secondes pour nous retrouver à l’extérieur. C’est là que nos parents nous attendaient morts… de rire. C’est là aussi que j’aperçus ma petite sœur Céline qui riait très fort. À partir de ce jour, je ne lui ai plus jamais confié un seul secret.