Subir les zigzags
Par Journal-le-nord
Penser des chroniques en temps de pandémie sans se répéter à chaque fois, c’est parfois du sport. On peut bien se changer les idées avec les élections aux États-Unis, mais une fois le décompte terminé, il faut accepter et passer à l’étape suivante. D’autant plus que de vouloir dégager des conclusions sensées, sans être moralisateur, ajoute à la tâche. Comment faire pour divertir la plèbe laurentienne dans l’entre saisons? Je tenterai de le faire à petite dose au fil des prochaines lignes.
Le mot qui me revient en tête ces temps-ci, c’est : « subir ». Bombardés que nous sommes d’attaques continues de « coupe la joie », à grand coup de « ça va être dur », et de « ça va être plate », nous risquons de ne voir que le brun, ayant déjà perdu le vert, en attendant le blanc.
J’écrivais dernièrement que bien que nous n’ayons pas toujours le choix des défis, notre attitude face aux obstacles nous appartient tout de même. Je persiste : l’attitude que nous adoptons est un élément important. Ensuite, on doit choisir entre subir et agir, peut-être même un peu des deux. On a le droit d’être fâché, c’est bon de se fâcher de temps à autre. Mais c’est la suite qui compte vraiment.
Comme mon but n’est pas de créer un débat philosophique complexe sur ce qu’est « agir », et « pourquoi ne pas agir est aussi une action », je me contenterai de vous faire le court récit du vendredi. Je suis en congé les vendredis, alors la plupart des bonnes histoires commencent ce jour-là.
En partant, c’était un vendredi 13. Déjà là, certains auraient choisi de rester tranquilles sur leur divan, pour éviter la malchance superstitieuse, et voir le nouvel épisode du Mandalorien. J’avais plutôt en tête une petite expédition d’un soir sous la tente, un peu au nord de Lac-Supérieur, quelque chose d’assez proche pour se rendre à vélo, sans avoir à planifier pendant des jours et perdre l’effet de surprise. J’aime me surprendre.
D’abord, choisir le matériel. C’est souvent l’étape la plus difficile pour moi. Quoi apporter? J’ai mes classiques : un petit brûleur et sa gamelle intégrée qui peuvent servir de bol ou de tasse, des allumettes, un canif, du gruau, de la bouffe lyophilisée et des morceaux de chocolat. Le gros luxe quoi.
Côté vêtements, ça se corse. Quelle température fera-t-il? Dans le temps c’était simple : une paire de pantalons et une veste de laine achetée au surplus militaire. Peu importait l’endroit ou les conditions, je n’avais que ça. De retour en 2020, ma garde-robe s’est complétée de pas mal trop d’options, quoique …
Le froid, ça se gère. Quelle sera la météo? La pluie, c’est plus complexe. Quand il pleut, il pleut. Tu peux te cacher dans la maison ou sous le balcon, il pleuvra quand même. Tu peux chialer qu’il pleut, que la pluie c’est plate et que tu n’aimes pas la pluie, il continuera de pleuvoir. Rendu là, il faut choisir : subir ou agir. Coton ouaté? Parapluie? Gore-Tex? Il y a bien sûr des options meilleures que d’autres. Une fois les outils choisis, bien étalés sur le sol, prêts pour le dernier élagage – question d’être plus « minimaliste » – on remplit les sacs et distribue le tout sur la monture.
Faire ses choix en étant conscient permet de cesser de simplement subir. On devient responsable de son bonheur … ou de son malheur. D’un côté, tant que l’on ne crée pas de situations pouvant placer d’autres personnes dans l’embarras contre leur volonté, aussi bien foncer et assumer. « … Il est où le bonheur, il est là … »
Parti léger côté sac de couchage, j’ai ter-miné la nuit le manteau enroulé aux pieds, dans le sac. Réveillé par le froid, j’en ai profité pour sortir la tête et regarder les étoiles en me réchauffant le cœur. Subir, choisir, zigzaguer et avancer : « telle est la voie ».
Bons zigzags amis campeurs!