Lettre ouverte: des finissantes en soins infirmiers brimées dans leur désir d’aider
Par Journal-le-nord
Cette lettre a été écrite par quatre finissantes en soins infirmiers du Cégep de Saint-Jérôme, soit Marie-Pier Landry, Caroline Marchand, Pénélope Cyr et Takou Keita avec l’aide d’une étudiante du Cégep d’Abitibi-Témiscamingue. Je me porte comme porte-parole pour vous transmettre un message au nom des étudiant(e)s finissant(e)s en soins infirmiers du Collège de Saint-Jérôme.
Tout d’abord, Nous voulons prendre le temps de remercier le gouvernement pour tous les efforts mis en place pour nous aider, et ce à tous les jours dans la lutte contre la COVID-19. Depuis plusieurs mois le monde est affecté par une pandémie, que jamais nous ne pensions vivre encore en 2020. Le Canada, comme plusieurs pays n’était pas prêt. Particulièrement, notre province, le Québec.
Le 17 avril 2020, l’OIIQ a émis des « autorisations d’urgence sanitaire » gratuitement pour les finissant(e)s en soins infirmiers, ce qui nous donne accès aux centres hospitaliers en tant que candidat(e)s à l’exercice de la profession infirmière (CEPI) dès maintenant, et ce jusqu’à la fin de la crise du Covid-19.
Pour certains cégeps tels que Collège Maisonneuve, Collège Bois-de-Boulogne, Cégep de Val d’Or, Cégep de l’Abitibi-Témiscamingue, Collège Montmorency et Cégep Édouard-Montpetit ont décidé d’accélérer le processus de réussite du programme de 6e session en soins infirmiers pour leurs finissants et d’accorder la mention « EQ » pour équivalence.
Pour d’autres, la session se poursuit, mais non sans bruit. Comment voulez-vous que les étudiants en soins infirmiers viennent prêter main-forte aux hôpitaux avec l’arrêté ministériel ? La majorité des étudiants y travaillent déjà comme préposé aux bénéficiaires. De plus, l’Arrêté fait par la ministre McCann ne spécifie rien sur la session en cours, donc la décision revient à chaque cégep de mettre fin ou non à la session avec la mention « EQ » et de libérer les étudiants finissants afin qu’ils puissent venir aider pendant cette crise mondiale exceptionnelle. Vous nous avez fait parvenir plusieurs communications sollicitant notre aide.
Malgré que nous ayons une grande volonté d’aider, il n’y a aucun finissant en ce moment qui a le désir d’annuler sa session à trois semaines de la fin pour se voir recevoir un incomplet pour revenir à l’automne. En ce moment, le Cégep nous donne un « faux » choix, car c’est bien évident qu’après 3 ans d’acharnement et pour la plupart, ayant un emploi en main, il est hors de question de recommencer ultérieurement. C’est notre futur qui est en jeu à ce stade-ci.
Nous vous implorons de nous donner la chance de vous prouver que la persévérance et la détermination de plusieurs finissants et finissantes feront la différence.
Le ministre a confirmé à mainte reprise que la session n’allait pas se rallonger et que les étudiants n’allaient pas être affectés par les différents changements. Ce n’est pas le cas pour le Cégep de Saint-Jérôme, puisque notre calendrier a été rallongé jusqu’au 3 juin 2020. En ce moment, nous vivons une injustice. Certains étudiants ont reçu la mention équivalence « EQ », d’autres sont en attente de terminer vers la fin mai. Pendant ce temps nos employeurs réclament notre arrivée plus rapidement.
Bref, nous payons pour une situation qui est hors de notre contrôle. Pour certains, il restait seulement 7 jours de stage et l’ESP pour terminer, avec 2 évaluations, surtout que les travaux de stage n’équivalent pas du tout à ce que nous aurions appris sur le terrain. Nous sommes prêts à aller aider, et ce, à temps plein MAINTENANT, et nous réclamons l’égalité entre les cégeps pour ce qui est de mettre fin à la session avec la reconnaissance de nos acquis. Nous réclamons l’équité, soit une des valeurs premières qui est enseignée en soins infirmiers. Nous sollicitons votre bienfaisance et votre sens de la justice. Et j’espère que nous pourrons avoir également une partie du poids de cette balance.
Malgré la majorité des cas sont à Montréal et Laval, il y a beaucoup de vos étudiants qui vont travailler dans un milieu hospitalier à Montréal et à Laval.
D’ailleurs, nous avons appris que les étudiants du campus de Mont-Laurier, qui fait aussi partie du Cégep de Saint-Jérôme n’auront plus de stages, plus de travaux compensatoires, mais seulement un examen synthèse ESP pour avoir leur diplôme. Comment un même Cégep peut avoir deux manières différentes de fonctionner pour donner un même diplôme. Nous avons tenté de faire valoir nos points à maintes reprises auprès de la direction du Cégep, mais elle n’accorde aucune importance aux opinions des élèves, ce n’est pas la première fois. Avec tous les points soulevés précédemment,
Considérant que nous sommes en voie d’être des professionnels de la santé qui respectons notre code de déontologie depuis notre entrée dans ce programme,
Considérant que nous sommes capables de reconnaître nos limites quant aux soins que nous prodiguons,
Considérant que les hôpitaux ont besoin de renfort et qu’il serait plus logique et judicieux de faire appel aux nouveaux infirmiers que de tenter de rapatrier les retraités qui sont plus vulnérables que nous,
Considérant que l’environnement de stage avec un groupe de six étudiants et un professeur n’est aucunement académique et favorise davantage la propagation du virus et augmente considérablement notre niveau de stress qui est déjà élevé lors d’une journée de stage,
Considérant que certains d’entre nous ont des familles et de jeunes enfants à la charge qui doivent rester à la maison et, eux aussi, continuer à faire des apprentissages, car les écoles primaires et secondaires sont également fermées pour le reste de l’année scolaire,
Considérant que nos professeurs sont en grande majorité en train d’aider dans les hôpitaux et que certains ont également des enfants à la charge qui doivent rester à la maison,
Considérant que des personnes concernées ont perdu leur emploi que ce soit temps plein ou temps partiel et qu’il est maintenant difficile de rejoindre les deux bouts,
Considérant que nos professeurs sont stressés tout comme nous et que chacun doit faire attention à sa propre santé,
Considérant que notre santé mentale est tout aussi importante que notre santé physique et que celle-ci est très fragile à cette heure,
Considérant que nous sommes des étudiants et avons à coeur la santé et le bien-être des autres, qui sont prêts et en qui vous devez avoir confiance, nous sommes déterminés à aller aider nos collègues sur le terrain. Nous voulons prendre soin des gens. Nos professionnels d’expériences étaient épuisés avant le début de cette crise, maintenant ils sont à bout … Bien évidemment, nous avons aussi les patients à coeur et nous voulons qu’ils reçoivent les meilleurs soins possible. Nous sommes prêts à nous lancer corps et âme dans cette bataille.
En ce sens, ce que nous demandons à M. Legault, à Mme McCann, au MEES, à la direction des collèges, principalement celui de Saint-Jérôme, et aux hôpitaux, c’est un accord commun pour nous exempter des travaux compensatoires exigés en soins infirmiers seulement afin de nous permettre d’accorder plus de temps au travail et participer à cet état d’urgence sanitaire. Les connaissances théoriques en lien avec notre profession sont déjà acquises. Maintenant, nous avons besoin d’expérience! Comme le dit si bien le proverbe, c’est en forgeant qu’on devient forgeron. Autrement dit, c’est par l’exercice que l’on acquiert de la compétence. Pour acquérir un savoir-faire, il faut le pratiquer et non pas seulement être excellent en théorie.
De toutes les manières, les étudiants finissants n’auront pas accès directement à la profession. Il va quand même falloir qu’ils réussissent l’examen de l’ordre qui va permettre de valider leurs connaissances et d’assurer qu’ils reconnaissent leurs limites dans la pratique.
Je vous invite également à consulter les résultats du sondage qui a été effectué au sein de la cohorte des finissants en soins infirmiers. Vous constaterez par vous-même les répercussions néfastes que cette fin de parcours suscite : https://www.surveymonkey.com/results/SM-2D2GF7FX7
Il y a un manque de volonté flagrant de la direction du Cégep de Saint-Jérôme et nous demandons l’équité. Le premier ministre ne cesse de demander l’aide de la population : il a même demandé que les personnes n’ayant aucune formation et compétence proposent leurs aides. Nous avons les connaissances nécessaires et nous sommes prêts à aider. La chose seule chose qui nous arrête, c’est le Cégep de Saint-Jérôme qui refuse de faire comme certains cégeps.
En attendant une réponse favorable de votre part,
Cordialement,
La cohorte de graduation de mai 2020 du collège de Saint-Jérôme