(Photo : Courtoisie )
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Line Chaloux

Par Rédaction

Directrice générale de l’organisme Le Coffret

1 – Avez-vous un souvenir précis de l’évènement du 6 décembre 1989, ou en avez-vous entendu parler? Décrivez la situation.  

J’étais à l’extérieur du pays. Je n’y croyais pas. Comme un cauchemar dont on m’aurait parlé.

2- Qu’est-ce que l’évènement a déclenché chez vous? Quelles sont les émotions ressenties? 

Je n’avais jamais imaginé qu’on pouvait être en danger au Canada, au Québec, à Montréal… Tout était à remettre en question : l’accès aux armes; les rapports homme / femme; la sécurité dans les universités. J’allais à l’UQAM à l’époque. J’avais le sentiment d’avoir perdu mon innocence … La colère de cet homme s’est transférée en colère collective.

3- Quel est l’impact qu’un tel évènement a-t-il eu sur votre choix de carrière ou comment cela a-t-il influencé votre vie en général? 

Les hommes autour de moi avaient le même choc … C’était généralisé comme dégout du geste. J’étudiais alors en immigration et en relations interculturelles, j’apprenais à accompagner des gens venus des pays en guerre, des témoins de cette violence, des victimes d’une incompréhension pathétique, voire pathologique des relations humaines.

4- En lien avec l’évènement, comment votre vision de l’éducation des enfants a-t-elle été influencée?  

Mes fils étaient très jeunes à l’époque, 12 et 10 ans. Déjà je militais pour la paix et ils m’accompagnaient dans mes activités et je me suis investie tête baissée dans une dynamique du vivre ensemble et j’ai toujours insisté pour qu’ils puissent exprimer leurs émotions.

5- 30 ans plus tard, quelle est votre perception de la place de la femme dans la société actuelle?  

Pour moi la femme donne la vie, elle ne la reprend pas … La violence est plus souvent qu’autrement une affaire de gars, la gestion de leurs contradictions me semble plus difficile. Les femmes doivent prendre une place en politique, en ingénierie, en médecine, etc, car elles ont une perception différente et amènent des alternatives plus constructives et pacifiques. 

6- Avez-vous été témoin d’une évolution dans la société ou chez l’ouverture d’esprit des hommes? Si oui, la décrire. 

Depuis 30 ans c’est certain qu’il y a eu une évolution dans l’ouverture d’esprit des hommes mais il y a aussi chez certains gars une frustration inconsciente par rapport à l’émancipation des femmes, à leur liberté, leur autonomie et leur indépendance. Et cette frustration est universelle malheureusement. Jamais autant de féminicides ont été perpétués, jamais autant de viols n’ont été faits comme arme de guerre… 

7- Comment s’exprime le féminisme d’aujourd’hui à vos yeux? Quelle est sa place?  

Le féminisme est perçu comme du terrorisme dans certains pays comme l’Arabie Saoudite. Ici au Québec, c’est une lutte pour l’égalité qui a permis d’atténuer les écarts.

8- Quelle est votre perception des nouvelles expressions du féminisme à travers les mouvements sociaux récents ou actuels (exemple: les mouvements #MeToo et #MoiAussi)? 

C’est une lutte essentielle qui se continue pour doter les femmes d’une assise solide et qui crie contre la violence et les comportements de bas instinct de certains hommes. Le danger est de généraliser et de mettre tous les hommes dans le même panier …

9- Avez-vous vécu des réticences ou des traitements différents au cours de votre parcours professionnel parce que vous êtes une femme?  

Jamais, j’ai été élevée par une femme très libérée et autonome qui nous a appris à prendre notre place très jeune. Je n’ai jamais laissé de place à l’ambiguïté dans mes relations avec les hommes. J’ai souvent eu à imposer d’ajuster le ton qu’on me parle, j’ai toujours lutté contre la condescendance dont on peut être victime en tant que femme.

10- Dans un monde idéal, quelle serait votre souhait de société pour les générations futures?  

Une société égalitaire où l’on respecte les différences de façon plus stratégique, entre autres en permettant plus aux gars de vivre leur pulsion de testostérones entre eux, dans des sports quotidiens et en protégeant les filles et les femmes de façon systématiques contre les propos mal placés et de sévir rapidement envers les hommes qui ne respectent pas le genre féminin. Je crois que nous devons lutter contre toute forme de violence autant chez les femmes que chez les hommes.

 

 

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